Quand Nadine Morano s'adonne à la réflexion de comptoir, ce sont les jeunes musulmans qui trinquent
"Moi, ce que je veux du jeune musulman, quand il est français, c'est qu'il aime son pays, c'est qu'il trouve un travail, c'est qu'il ne parle pas le verlan, qu'il ne mette pas sa casquette à l'envers".
Les étudiants musulmans de la faculté dans laquelle j'étudie apprécieront l'image que la secrétaire d'Etat chargée de la Famille et de la Solidarité donne d'eux, alors même que la semaine dernière, après le référendum suisse sur les minarets, le président de la République avait rappelé dans une tribune publiée par Le Monde les valeurs de tolérance et d'ouverture de la France.
Comme beaucoup l'avaient prédit, le débat sur l'identité nationale lancé par le Ministère de l'Immigration et de l'identité Nationale tourne à la réflexion de comptoir, et cela pourrait bien se retourner contre le gouvernement.
D'abord parce que cela a ravivé les braises de la division au sein de la droite et ensuite parce que cela pourrait ne pas profiter à ceux que l'on croit : "A force de jouer avec l'identité nationale, il peut y avoir un effet boomerang dont on mesurera les premiers effets aux élections régionales : on ne joue pas avec le Front national!", avait lancé Maurice Leroy, vice-président du groupe Nouveau Centre à l'Assemblée Nationale. Les partisans de Dominique de Villepin, comme Jean-Pierre Grand (UMP), en ont profité pour donner de la voix et dénoncent "un merveilleux appel d'air pour le Front national. Je le regrette profondément. L'identité nationale est un débat dangereux, inutile, qui ne fait pas honneur à la classe politique".
Alors que chacun se perd en définitions plus ou moins pertinentes de ce qu'est l'identité nationale, on risque d'oublier que la jeunesse française, pas seulement musulmane, pas toujours issue des banlieues et pas nécessairement délinquante, pâtit d'une crise de l'emploi sans précédent. S'il suffisait de chanter La Marseillaise, de déclamer du Molière et de mettre sa casquette à l'endroit pour réussir un entretien d'embauche, cela se saurait.
S'évertuer à définir ce qu'est un bon ou un mauvais musulman, un bon ou un mauvais Français, fait perdre de vue l'essentiel, c'est à dire ce qui lie notre nation. Etre Français c'est avoir une carte d'identité française, point final. Etre Français c'est vivre dans une République indivisible et laïque, qui juge équitablement chacun de ses citoyens non pas selon ce qu'ils sont, mais selon ce qu'ils font.